Mathieu COMBOT - Ecole Marseille
Après une année très formatrice et intense en émotion avec l’association du père Jaouen, il me fallait finir mes temps d’élève afin d’obtenir mon brevet. J’ai donc eu la chance de trouver un embarquement grâce à la Touline chez France Telecom Marine. Un embarquement de deux mois sur le navire câblier René Descartes.
C’est donc en Angleterre que j’ai rejoint le navire, au port câblier de Portland. J’ai tout de suite été très bien accueilli par l’ensemble des officiers (tous français) et de l’équipage (français et malgaches). Nous étions au total 70 personnes à bord en comptant également tous les missionnaires spécialistes dans la pose et la maintenance de câble sous-marin. J’ai pu me familiariser avec le bateau pendant 3 jours avant d’appareiller vers une zone de travaux au large de la côte est du Canada pour une mission d’une dizaine de jours par 5000 mètres de fonds. L’objectif était de changer plusieurs répéteurs (sorte d’amplificateur de signal) installés sur un même câble. Etant composé de fibres optique, un câble sous-marin peut transporter énormément d’information en même temps à la foi pour internet et pour la téléphonie. A partir d’une certaine longueur de câble, des pertes se créent affaiblissant ainsi le signal passant dans le câble. C’est pour compenser ces pertes que des répéteurs sont installés afin que les informations soient bien transportées jusqu'à la terre. La manipulation d’un câble restant très délicate et imposant des vitesses et routes fond très précises, le navire est équipé d’un système de positionnement dynamique très élaboré. Ce système automatisé permet un contrôle très précis du navire face aux éléments extérieurs que sont la force de la mer et le vent. En conséquence, la puissance nécessaire est adaptée aux besoins. En effet, le navire est équipé de quatre groupes électrogènes (2 démarrés en fonctionnement normal suffisent, 3 par météo défavorable et un prêt à démarrer en cas de souci) fournissant l’énergie nécessaire pour alimenter deux moteurs électrique de propulsion de 4000kw chacun, quatre propulseurs transversaux (deux à l’avant, deux à l’arrière) ainsi qu’un propulseur azimutale à l’avant.
Nous sommes donc partis de Portland pour rejoindre la zone de travaux à une douzaine de jours de mer. La météo nous a contraint à faire route plus au Sud afin d’éviter de fortes dépressions en Atlantique Nord. Bien sûre, au milieu de l’atlantique le trafic maritime n’étant pas trop stressant (un bateau par jour en vision tout au plus), je n’ai fait que de la machine.
En machine, une ambiance vraiment très bonne, je m’y suis vite senti bien. L’équipe des officiers se compose d’un chef méca et d’un second bien sûre. Mais aussi d’un officier diesel, responsable des quatre groupes électrogène (et tout ce qu’il s’y rattache, séparateur, bouilleurs...etc...) et d’un officier extérieur, chargé du bon fonctionnement de toute les machines extérieurs (principalement les installations frigo, les cinq propulseurs électriques, les machine à câbles tournantes et tout l’hydraulique du bord). Ces deux officiers sont accompagnés d’un maître diesel et d’un maître extérieur en général très expérimentés et donc d’une aide plus que précieuse (pour un élève, le mieux est de suivre les maîtres pour apprendre un maximum). L’équipe se compose également d’un maître électricien, un maître automaticien, trois ouvriers mécaniciens et un nettoyeur. Le contact avec les malgaches se fait très rapidement étant donné qu’il n’y a pas la barrière de la langue. Le travail en machine est donc très complet et varié donc très intéressant. J’ai beaucoup appris grâce à tout le monde .
Nous voici arrivé sur la zone de travaux. La mission peut commencer car la météo est plutôt favorable. Grâce au tracé théorique du câble que les missionnaires ont établis, nous pouvons ciblé à quelque kilomètres près où se trouve le câble. Pour ne pas endommager le câble, il est très important de suivre de façon précise le tracé du câble à vitesse très faible (entre 0.2 et 1.5 nds). Pour cela, nous disposons d’un logiciel très fiable en passerelle nommé « Espadon », indispensable en positionnement dynamique. La première étape va être de mettre une drague coupante à la mer pour couper le câble. Ensuite il faut aller relever une des deux extrémités à l’aide d’une drague relevante pour mettre l’extrémité sur bouée pour récupérer facilement le câble quand il s’agira de revenir le chercher. L’étape suivante consiste à aller relever l’autre extrémité du câble jusqu'à arriver au répéteur à remplacer. En mission de maintenance de câble, le commandant et le second capitaine
fonctionnent en quart de 12/12 au davier. Le davier, situé à l’arrière du navire, est le rouleau monté sur un axe destiné à filer ou relever le câble. Ce sont eux qui donnent tous les ordres par UHF de tout mouvement du navire au lieutenant de quart qui est devant la console du DP en passerelle. Le chef méca et son second fonctionnent également en quart de 12/12 aux commandes des machines à câbles. Ils sont accompagnés d’un ouvrier mécanicien aux ordres des adjoints au chef de mission. Sur le pont, pour toute manipulation du câble, des filins, de la bouée...etc, le bosco et les maîtres de manœuvre fonctionnent en quart de 4 heures. Avec eux, un chef de bordé et trois matelots tous dotés d’un grand savoir-faire pour toutes les manipulations. Et enfin pour les élèves, généralement ils accompagnent les lieutenants de quart à la passerelle pendant toute la durée de la mission. Et cela commence à devenir très intéressant quand l’officier nous laisse les commandes du DP.
Après avoir réussi cette mission sans problème conséquent, nous nous sommes dirigés vers la Nouvelle Ecosse, plus exactement vers le port d’Halifax. Une escale, bien méritée après trois semaines de mer sans voir la terre, pour faire une relève de tous les officiers et l’équipage français. La deuxième équipe s’est révélé aussi sympathique que la première, l’intégration pour un élève se fait assez rapidement. Il suffit d’y trouver sa place !
La seconde mission avait exactement le même objectif que la première. Les conditions météo ont été moins favorables mais l’objectif fut atteint. Nous avons ensuite fait route vers l’Europe, d’abord à portland pour décharger du câble, puis Brest et enfin Saint Nazaire, où je termine mon embarquement. Le navire partait ensuite pour une mission de pose de câble d’énergie pour recueillir l’électricité fournie par une future hydrolienne au large du Croisic.
Cet embarquement m’a beaucoup plu, de par la quantité mais aussi et surtout la qualité de toutes les choses que j’ai apprises à bord. Je remercie Mme Le Page et Mme Lestrat et l’ensemble de l’équipe de la Touline pour m’avoir offert cette opportunité après 6 mois de recherche. Dans ce climat très tendu dans le monde de la marine marchande pour les élèves et les jeunes officiers, une association comme celle-là se révèle d’une utilité primordiale. Merci à vous d’exister.